vendredi 9 mai 2014

Le Culte de Baphomet

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Baphomet
Baphomet est le nom donné par certains occultistes du XIXe siècle à l'idole mystérieuse que les chevaliers de l’ordre du Temple furent accusés, à tort ou à raison, de vénérer. Le plus souvent représentée par la tête d'un homme barbu, l'idole était vénérée mais également crainte pour sa laideur. On peut remarquer chez lui une poitrine ainsi qu'une tête de bouc. Selon certaines sources invérifiables car légendaires, le culte de Baphomet aurait eu lieu durant les rites secrets des Templiers. L'effigie de Baphomet était sortie et montrée à tout le monde, sous la lumière de bougies noires. Très laide, elle provoquerait l'effroi en la voyant. Durant certains rites, les Templiers embrassaient la tête puis l'entourait de cordelettes ; celles-ci étaient par la suite portées autour d'eux-mêmes. Cette pratique serait issue d'une coutume palestinienne qui voulait que ces cordelettes aient des propriétés magiques telles que la guérison des malades.

Si on s’attarde sur l’image du mal dans les différentes traditions il faut souvent faire une recherche sémantique pour savoir d’où vient le terme employé. Satan vient de l’hébreu, lucifer du latin, diable du grec et quand est-il de Baphomet ? 
Et bien nous voila face à la première énigme du Baphomet, son nom. Son origine et son nom sont certainement étroitement liés mais qui faut-il croire ?

Dans le Nouveau Testament, l'évangile de Saint Matthieu mentionne à plusieurs reprises une séparation du bien et du mal par un clivage Gauche / Droite. La Gauche symbolisé par des boucs représentant le Mal, et la Droite incarnée par des Brebis s'identifiant au Bien, symbole du Christ sous le nom de Fils de l'homme. 
Nouveau Testament (Saint Matthieu, Chapitre 25, Verset 32 à 34) " …Toutes les nations seront assemblées devant lui. Il séparera les uns d'avec les autres, comme le berger sépare les brebis d'avec les boucs ; et il mettra les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche. 
Nouveau Testament (Saint Matthieu, Chapitre 25, Verset 41) " …Ensuite il dira à ceux qui seront à sa gauche : Retirez-vous de moi, maudits ; allez dans le feu éternel qui a été préparé pour le diable et pour ses anges. Car j'ai eu faim, et vous ne m'avez pas donné à manger ; j'ai eu soif, et vous ne m'avez pas donné à boire… ".

D’après Eliphas Levi dans son dogme et rituel de la haute magie Baphomet serait l’abréviation de « Templi omnium hominum pacis abbas » (lu à l’envers), avant Eliphas Levi le Baphomet ne possédait pas d’image c’est de lui que nous vient cette iconographie, c’est aussi en parti de lui que nous vient toute une mythologie qui lie le Baphomet au templier et au franc-maçon, même si comme nous le verrons tout cela semble pure invention. Le Baphomet sera ensuite repris, son image manipulée pour la faire rentrer dans un pentagramme à l’envers, pour finalement finir adopté en 1966 comme symbole de l’église de satan d’anton Szandor LaVey. 

Pour comprendre comment ce symbole fut associé au templier et au franc-macons il faut d’abord s’attarder un peu sur l’histoire des templiers… 

LES ORIGINES DU BAPHOMET
Revenons au début, en l’an de grâce 1118 Hugh de Payen et André de Montbard fondent les chevaliers du temple. Ceux qui furent les « Pauperes Commilitis Christi et Templi Salomonis » seront pour toujours liés à l’image du Baphomet. Sur 231 chevalier, 12 admirent sous la torture connaitre quelques choses de cette fameuse icone. 

On ne retrouve pas trace du terme Baphomet, dans les édits du roi Philippe pour l’arrestation des templiers, de même que dans aucune de bulle papale de Clément V. Les accusations parlent de l’adoration d’idole, de chat ou de tête ayant parfois trois faces. Les descriptions arraché sous la torture varie d’un procès à l’autre et on a ainsi des descriptions d’une tête à une ou deux face, parfois barbu, faite d’argent ou de bois, l’image d’un homme ou d’une femme, une tête momifié brillant dans le noir ou bien encore et tout simplement un démon. On en retrouve mention dans les témoignages contradictoire de Guillame d’Arbley, précepteur du temple de soissy. On retrouve cependant dans les compte-rendus de procès l’adjectif « bafométique » ainsi Gaucerant avoua avoir adoré une "image bafométique" qui, en langue d'oc, est une déformation de Mahomet, et n’a donc à priori aucun rapport avec l’idole décrite par Eliphas Levi.

Montague Summers suggère dans son histoire de la sorcellerie et de la démonologie paru en 1926, que Baphomet serait la combinaison de deux mots grecs « Baphe » et « Metis » ce qui signifierait « absorption dans la sagesse » (ou plutôt baptême de conseil ou ruse si l’on se réfère a la signification des mots grecs), idée sans preuve qui sera repris par de nombreux auteurs. On peut ici citer aussi le Dr Schonfield qui dans son livre « Les Esséniens et les Templiers » paru en 1984, assure que Baphomet est la résultante d’un codage suivant le code de substitutions hébreux atbash et signifierais « sophia » soit la sagesse en grec. Selon son interprétation, en vénérant Baphomet, les Templiers auraient voué en vérité un culte au principe de sagesse… ou aussi à la gnose.

Les auteurs modernes, pour rattacher le Baphomet au templier, font souvent référence au pentagramme, mais il n’existe pas de preuve de l’utilisation de ce symbole par les templiers. Le pentagramme fais donc le lien entre le Baphomet, les templiers et par extension les franc-maçons. C’est, comme nous l’avons déjà dit, une pure interprétation d’Eliphas Levi dans son Doctrine et Rituel paru en 1861, dans laquelle il le nomme « le bouc de Mendés », son ouvrage contient entre autre la fameuse illustration du Baphomet à tête de bouc, corps de femme, citation alchimique sur les bras (Solve & Coagula), caducée en guise de verge et bien sur notre fameux pentagramme sur le front. On lui accorde aussi, la première interprétation arbitrale, que le pentagramme pointe vers le bas serait une représentation de Baphomet, aucun association connu du pentagramme avec le mal n’existe avant lui.

Samael Lilith
La représentation de Baphomet pourrait être inspirée du visage imprimé sur le Saint-Suaire de Turin. De nombreuses suppositions sur son véritable visage ont été effectuées : ainsi, on lui attribue le visage barbu de l'église de Templecombe à Somerset. À Paris dans le 4e arrondissement, on trouve un diable sur le tympan du porche de l’église Saint-Merri. Il fut sculpté entre 1841 et 1843. Certains y voient l'image d'un Baphomet. Cette insolite présence est signalée par Umberto Eco dans son roman le pendule de Foucault.

Toutefois, l'idole possiblement vénérée par les Templiers est de formes très diverses selon les témoignages recueillis durant les procès : tantôt très grande, tantôt tenant dans une poche, parfois en bois, en os ou en métal, sous la forme d'une statue ou d'une toile de peinture, l'idole représente souvent une tête d'homme barbu mais peut également être un lion à tête de femme, ou un visage presque humain pâle avec des cheveux frisés. Les inquisiteurs recherchèrent activement des têtes en bois ou en métal représentant Baphomet, qui auraient été nombreuses. Même les membres haut placés de l'Ordre du Temple, tels que Hugues de Pairaud, furent incapables de décrire la tête, expliquant qu'elle était trop hideuse pour être décrite, ou bien qu'ils fussent trop loin pour la voir.

LE BAPHOMET ET LES TEMPLIERS
Ecusson des Templiers
Les Templiers ont été alimenté de l'ésotérisme de ces communautés orientales. Cela explique l'incompréhension de l'Occident à leur égard. Après la chute d'Acre en 1291, les Templiers ont transporté leur quartier général au château de Limassol, à Chypre, où existait une chapelle templière. C'est l'arrivée de Richard Cœur de Lion, un siècle avant, qui avait mis en lumière cette implantation templière. En 1191, Richard devint possesseur de Chypre qu'il vendra plus tard au Grand Maître du Temple Robert de Sablé.

En 1228, l'empereur Frédéric II part en croisière à Chypre. Un an après, il entre à Jérusalem et abandonne la croisade. Durant son séjour à Chypre, il n'a pas admis certaines défaites, et a répandu des calomnies sur les Templiers. Ces calomnies seront reprises au procès. Après le départ de Chypre de l'empereur, Jean d'Ibelin empêche les impériaux d'investir l'île. Il écrasera le maréchal Ricardo Filanghierri. La couronne de l'île appartiendra à un neveu d'Ibelin, Henri de Lusignan. Celui-ci recevra Louis IX et ses croisés, la chevalerie cypriote, la syrienne et l'anglaise. Les Templiers étaient unis à Jean d'Ibelin qui demandera son entrée dans l'Ordre du Temple. 

La présence templière à Chypre a permis un étroit contact avec la communauté chevaleresque et religieuse orientale. Certains de ces chevaliers se sont unis par mariage avec des françaises. Les ibelins, protecteurs des Templiers se sont aussi unis par mariage à des femmes des communautés orientales. Les Templiers avaient leur quartier général à Baffo, sur la côte occidentale de l'île. Le peuple de la ville adorait une idole, "Baffometus". Il payait un tribu à Baffo avec une pierre de meule appelée "méta" dont la forme était celle de leur idole. 

On retrouve dans le procès l'accusation contre les Templiers d'adorer une idole, le "Baphomet". Et, si cela signifiait Baffométus ? Dante dit que c'est de l'Orient que vient "Lucie" ou "La Lumière". La gnose, la kabbale et tout le syncrétisme alexandrin y ont leur origine. En Egypte, les chevaliers templiers furent initiés par des prêtres coptes sur les bords du Nil. La rencontre Orient-Occident a une expression symbolique : celle de l'usage de l'ésotérisme. 

Dans leurs réunions secrètes, les Templiers utilisaient pour s'exprimer la fameuse "langue des oiseaux", la langue des initiés. Elle touche au chant, à la versification, à la langue rythmée. L'oiseau initiateur du chant est le rossignol dont on parle dans les cours d'amour, dans les poèmes de Dante. C'est l'invocation du Nom divin dans une langue sacrée, selon une technique numérale et rythmique. C'est aussi l'harmonisation des divers éléments de l'être qui ouvre une communication avec les états supérieurs. 

La légende copte et la syrienne disent que ce sont trois oiseaux paradisiaques qui ont donné au diacre d'Axoum, les hymnes de l'Eglise éthiopienne en l'emmenant dans la Jérusalem céleste où il reçut la doctrine des 24 vieillards et les trois modes du temps sacré : grave pour le Père, mélancolique pour le Fils, et léger et fleuri pour le Saint Esprit.

Les arabes chrétiens de Syrie et de Mésopotamie se rapprochaient des chrétiens d'Arménie. Leurs Eglises accordaient une grande importance à la figuration du centre. Ils établissaient une correspondance entre le centre de l'édifice, la clé de voûte solaire et la valeur du mot hébraïque "Ame" qui vaut 91 = 9 + 1 = 10. 

Les chrétiens terminaient leur signe de croix en ramenant les mains au centre du corps. Certains documents assurent que le christianisme primitif utilisait ce signe de croix, et que les croisés et les Templiers l'avaient adopté. Les templiers ont trouvé en Orient, des vestiges de l'ancien Christianisme gallo-hispanique encore en usage au XII° siècle. Les liturgies orientales de Chypre, la liturgie syrienne, le culte angélique et l'angéologie juive rendaient Dieu présent en sauvegardant sa transcendance. 

Sous le règne de Constantin, les formulations dogmatiques de l'Eglise catholique se sont créées. L'Eglise décrète "portion de vérité d'Eglise, de hérésie", ce qui se pratiquait. On a pu dire plus tard que les Templiers étaient opposés au Christianisme de Rome, donc hérétiques.

Dans les siècles qui suivirent les contacts entre Templiers et orientaux, certains concepts ont été déformés par les soldats du Temple non initiés, et ont perdu leur spiritualité. Mais, malgré les différences conciliaires, plusieurs points communs unissaient les Eglises de courants différents. Les Templiers et les Hospitaliers disposaient à Famagouste, de nombreuses églises et cette ville était réputée pour être un carrefour entre l'Europe et l'Orient, l'Asie Mineure, la Syrie et l'Egypte. Jusqu'à la chute de Saint Jean d'Acre, en 1291, dominicains, franciscains et éthiopiens avaient d'étroites relations. Les Confréries de maçons, les constructeurs arméniens et leurs frères latins gravitaient autour de l'Ordre du Temple, principal maître d'oeuvre à Chypre et en Méditerranée. Il en allait de même au sein des Organisations de Chevalerie entre arméniens, coptes, abyssins et mongols. Le chanoine Prémontré Hethoun demande au roi Léon III d'Arménie, une croisade des nubiens convertis à la foi du Christ par l'Apôtre Saint Thomas. Les coptes, égyptiens convertis disposaient de nombreux couvents entre le Nil et la mer Rouge. Les plus anciens et les plus illustres sont ceux de Saint Antoine et Saint Paul. Ces fidèles convertis refusaient le culte des images ou de la représentation par la sculpture. Ils avaient le culte de la croix mais non du crucifix. 

L'AFFAIRE LEO TAXIL
Affiche de Leo Taxil
Et puis en 1894, viens le fameux Léo Taxil, connu pour avoir monté un canular sur la franc-maçonnerie dans le but de piéger l’église catholique, mais qui malheureusement continue d’alimenter les mythes et légendes sur nos amis FM. Ainsi dans ses ouvrages anti-maconnique on retrouve notre fameux Baphomet immortalisé par de gravures qui feront, et font toujours le tour du globe. L’ensemble de ces textes et des hypothèses sans fondements, sera ensuite repris par bon nombres d’auteurs. Albert Pike, grand auteur FM, reprendra les écrits d’Eliphas Levi, ce qui ne fera que renforcé le mythe de l’adoration baphométique des franc-maçon. La tête de bouc à l’intérieur d’une étoile à cinq branche, semble être une invention de Paul Jagot dans son « science occulte et magie pratique » paru en 1924, puis repris par Charles W. Olliver dans son « Manuel de magie et de Sorcellerie » ou la tête apparait cette fois avec les mots « samael » et « lilith », Oswald Wirth incluras cette tête dans le deuxième tome de « La Franc-Maçonnerie Rendue Intelligible à ces Adeptes » en 1931. Et il faudra attendre 1966 pour que ce symbole, vraisemblablement d’après Wirth, sois repris par l’église de Satan, et que ces symboles (aussi bien le Baphomet que le pentagramme) sois définitivement associés avec Satan.

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